le département des Arts de l'Islam made in France
Un tapis volant flotte au-dessus de la cour Visconti. Tout un symbole. Car cette verrière de maille mordorée abrite désormais le département des Arts de l'Islam. "Islam avec un grand I", insiste Sophie Makariou, sa directrice. "Ecrit avec une minuscule, le mot évoque la religion. Avec une majuscule, il désigne la civilisation". Et c'est précisément sur les traces d'une civilisation vaste et complexe qu'entraînent les 3000 objets déployés dans le nouveau bâtiment. Balayant treize siècles d'Histoire et traversant trois continents, bien au-delà des frontières du seul monde arabe: des rivages de l'Espagne jusqu'aux confins de l'Inde.
Un enjeu artistique et politique
Si ce département a pu voir le jour, c'est parce que le Louvre détient une exceptionnelle collection d'art islamique, l'une des plus belles au monde. "Son origine remonte à la Révolution française, explique Henri Loyrette, président de l'institution. Mais seulement un dixième de ses 15.000 pièces était présenté, perdu au milieu des antiquités orientales". Une injustice qu'il avait voulu réparer, dès sa nomination à la tête de l'établissement, en militant pour la création de ce huitième département, à égalité avec celui des antiquités égyptiennes ou gréco-romaines. "C'est un chapitre considérable qui faisait défaut à la grande encyclopédie du Louvre", explique-t-il.
En octobre 2002, Jacques Chirac, alors président de la République, entérinait le projet. Dans un contexte délicat: l'après 11 septembre. "La nécessité de montrer la face lumineuse de cette civilisation nous était alors apparue d'autant plus impérieuse", se souvient Henri Loyrette. Dix ans plus tard, la situation ne s'est pas améliorée. Cruelle concomitance: l'inauguration, qui s'est déroulée le 18 septembre sous l'égide de François Hollande, a eu lieu en pleine crise, alors qu'une partie du monde arabe sombre dans le fanatisme et la violence. "Il faut redonner sa grandeur à l'Islam, martèle Sophie Makariou, et ne pas le laisser aux djihadistes et à ceux qui le salissent".