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6 novembre 2010

Jean Rouch, le cinéaste qui découvrit le fleuve Niger « petit à petit »

Jean Rouch, le cinéaste qui découvrit le fleuve Niger « petit à petit »

par Philippe Rekacewicz

 

 

Tillabéry est un petit bourg situé à deux heures de route de Niamey, là où le fleuve Niger se scinde en une multitude de bras. Trois à quatre heures de pirogue sont nécessaires pour ceux qui souhaitent se rendre dans les villages situés de l'autre côté. En espérant que les hippopotames ne soient pas de trop mauvaise humeur, auquel cas faudra-t-il faire encore plus de détours et considérablement rallonger le voyage dans cette eau brune chargée de sable et de limons. A chaque averse, les voyageurs accostent et courent s'abriter dans les petites cases de fortune construites par les pêcheurs, qui chanteront en s'accompagnant d'une guitare pour que l'attente semble moins longue. Les voyageurs laisseront un peu d'argent entre les cordes de l'instrument. Pour ne pas heurter ses hôtes, c'est la guitare qu'on remercie...

Le fleuve Niger est un univers en soi, une société dans les sociétés africaines. « Le Niger, disait Jean Rouch, c'est la brousse, le "pays de la chasse au lion", la brousse qui est plus loin que loin, le pays de nulle part. Et au pays de nulle part on peut rêver, on peut inventer. Et dans ce pays de nulle part, il y a le fleuve, et le fleuve c'est un miracle : le Niger est magique. »

Au pays des génies et des esprits, le qualificatif est approprié. « Dans ce pays où les gens n'ont rien, poursuivait-il, on sait être heureux. C'est pourquoi j'ai choisi de rester. Il existe comme ça dans le monde des petits paradis, et pour moi, le Niger en est un : c'est le désert, un paradis et le rire. Dans ce pays, les gens n'ont pas peur de la mort, car ils admettent que la mort est nécessaire pour que la vie existe ; nos civilisations occidentales, elles, vivent dans la terreur de ce qui va se passer après la mort. » Rouch, fasciné par les mythes, les rites et les légendes portées par le fleuve et les falaises - deux fractures majeures de la géographie physique de cette région -, aura consacré sa vie à les observer et les référencer avec sa caméra, qu'il utilise comme un stylo. Il filme comme d'autres prennent des notes, sans idées préconçues, sans scénario et en essayant d'interpréter le moins possible.

Tout commence en 1946. Jean Rouch part avec ses deux amis Jean Savy et Pierre Ponty pour une expédition exceptionnelle : la descente du fleuve Niger en pirogue de la source au Golfe de Guinée, sur plus de 4 200 kilomètres. Le voyage dure environ neuf mois et Rouch filme les paysages, la savane, le fleuve, les sociétés... Il sait à peine se servir de sa caméra, mais qu'importe, il apprend au fur et à mesure qu'il tourne, il comprend en même temps qu'il filme et surtout quand il remonte sa caméra, « le plus lentement possible, disait-il, pour réfléchir à ce que je viens de tourner et prévoir comment je vais tourner la suite ». Rouch est un cinéaste progressif, il n'anticipe pas, laisse les scènes se dérouler librement sous sa caméra : c'est un bricoleur génial qui ne construit pas son oeuvre, mais qui la laisse se construire au gré de ce qu' il découvre sur les terrains de ses tournages.

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