Recul en trompe-l'oeil du chômage
Emmanuel Lechypre, responsable du Centre de prévision de l'Expansion - 27/01/2010 16:22:00
La baisse du nombre de demandeurs d'emploi en décembre semble plus relever du répit que d'une inversion de tendance. L'analyse d'Emmanuel Lechypre, responsable du Centre de Prévision de l'Expansion.
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Ce fut l'une des phrases choc de la rencontre entre Nicolas Sarkozy et les Français lundi soir sur TF1: "Je sais que dans les semaines et les mois qui viennent, vous verrez reculer le chômage dans notre pays". Nul doute qu'en s'aventurant à un tel pronostic, le chef de l'Etat avait en tête les chiffres de l'emploi pour le mois de décembre publiés officiellement mercredi 27 janvier.
Car c'est un fait : ils sont nettement meilleurs que ceux des mois précédents. Le nombre d'inscrits au chômage sans activité a en effet diminué de 187.00 au cours du dernier mois de l'année à 2,61 millions en métropole, alors qu'il avait augmenté de 425.900 sur les onze mois précédents.
Reste que cette bonne performance, à l'instar de celle de septembre, semble plus relever du répit que d'une inversion de tendance, même si la petite amélioration du marché de l'intérim permet de penser que les pertes de postes seront toutefois moins nombreuses dans les mois à venir.
La hausse du chômage va se poursuivre
D'abord, le chômage ne commence généralement à baisser que trois à six mois après la reprise de l'activité. Or celle-ci, pour l'instant, ne concerne que quelques secteurs qui profitent du restockage (les biens intermédiaires) et l'automobile, dopée par la prime à la casse.
Mais aucun moteur durable de l'activité, ni la consommation (les soldes ont été très décevantes, avec un chiffre d'affaires inférieur de 5% à celui d'il y a un an), ni l'investissement (qui baissera encore en 2010, selon les industriels interrogés par l'Insee) ne sont encore en état de marche.
Ensuite, les entreprises elles mêmes se déclarent nettement plus nombreuses à vouloir licencier qu'à vouloir embaucher dans les prochains mois, si l'on en croit le baromètre des grandes entreprises réalisé récemment par L'Expansion et le cabinet de conseil Manage Yourself.
Au final, même les institutions officielles comme l'Insee ou l'Unedic continuent d'anticiper une hausse du chômage dans les prochains mois (125.000 demandeurs d'emplois supplémentaires au premier semestre selon l'Insee). L'OCDE, quant à elle, estime carrément que le pic du chômage ne sera pas atteint avant le début de 2011 dans l'Hexagone.
Nul doute qu'il y aura alors de bonnes âmes, au Parti Socialiste par exemple, pour rappeler au président de la République ses pronostics aventureux de ce 25 janvier 2010.